How to kill time

Fin de concession

Habitué de la critique de la télévision, et 12 ans après son extraordinaire brûlot Pas vu, pas pris dans lequel il se "payait" Canal+, Pierre Carles revient avec une ambition louable : décortiquer les raisons pour lesquelles la concession de TF1 a été systématiquement (et automatiquement) renouvelée depuis 1987.




FIN DE CONCESSION






Fin de concession, avant même sa sortie, avait bénéficié du buzz généré par internet par deux vidéos "scandaleuses" (alors que, osons le dire, elles n'étaient scandaleuses que pour les tartufes dont on parlait...) présentant Arnaud Montebourg affirmant que "c'[était] le bon moment pour taper sur TF1" pour la première et Jean-Luc Mélenchon traitant David Pujadas de "larbin" et de "salaud" pour la seconde. L'ébullition a été telle que la petite blogosphère politique s'en est (presque) émue, et que les journaux sont allés jusqu'à interroger Mélenchon sur ses propos a priori insultants...
Revenons plus loin, en terme de chronologie. Pierre Carles, bien connu de la télévision pour (et contre) y avoir travaillé, s'interroge sur le renouvellement automatique de la concession de TF1, chaîne qui pourtant ne remplit pas - et loin s'en faut - le cahier des charges présenté lors du rachat par Bouygues en 1987.

Commençant son pamphlet - fort argumenté - à la façon d'un Michael Moore (il est d'ailleurs surnommé le "Michael Moore français" par des collègues sud-américains), Carles se heurte à un mur du silence écrasant. A Tapie qui refuse de répondre à "Avez-vous sciemment menti à la CNCL ?" et qui clôt l'entretien téléphonique par une réponse laconique du style "le sujet ne m'intéresse pas, je n'ai pas envie d'être interrogé là-dessus", à Mougeotte qui reste bouche close face à son "Pernaut, il fait un journal de droite", Pierre Carles commence à sentir l'ampleur de son projet et les difficultés qu'il va rencontrer. Malgré les postiches dont il tente de s'affubler - allant jusqu'à se faire appeler Carlos Pedro pour interviewer Charles Villeneuve qui le renverra de son bureau après s'être énervé - le journaliste désespère. Traité comme quelqu'un de "respectable" par Cavada, "la pire chose qu'on puisse [lui] dire", Pierre Carles sent qu'il a perdu son "fighting spirit". Il décide alors de passer à autre chose tout en entreprenant une profonde introspection.






Et si la méthode employée jusqu'ici n'était pas la bonne ? Et si, au lieu de chercher à prouver, à argumenter, à interroger les responsables, à tenter de montrer les liens étroits - pour ne pas parler de connivences - entre politiques et journalistes il suffisait de changer radicalement de méthode et d'attaquer frontalement l'ennemi muet ?
Décidant d'employer des techniques reprochées à ses adversaires, Carles fait un "Castro à la PPDA" avec Cavada, en lui lançant ce qu'il a sur le coeur, ce que tout journaliste devrait lui dire, alors que l'intéressé est parti. Il reconnaît la supercherie et va alors achever son introspection pour retrouver son esprit combattif. Une journaliste "professionnelle" est engagée pour faire dire à Jean-Pierre Elkabbach d'innommables mensonges - à en croire l'énorme "MENTEUR" que Carles gribouille en arrière-plan, avant de se faire attraper et reconduire à la porte par un service de sécurité d'accord sur le fond (l'interrogation journalistique) mais contraint d'obéir et de chasser les trublions.
Le point d'orgue de cette bouffonnerie qui n'a d'égale que celle que la "corporation" semble lui opposer est sans conteste la remise à Pujadas d'une laisse en or - le fameux prix "Laquais d'or" - en repeignant à la bombe son scooter d'une très seyante couleur aurifère.
Interpelant finalement au téléphone Mélenchon (via son répondeur) Carles prétend préparer d'autres actions - dont une vue récemment lors de la manifestation devant l'Hôtel Crillon au moment du dîner du Siècle.
Malgré ces dernières potacheries - salutaires - Carles donne un ton désabusé, reconnaît sa défaite, celle de n'avoir pu amener les responsables aussi bien politiques que journalistiques à avouer les raisons de la reconduction automatique de la concession de TF1. Fort d'une autodérision cinglante, il réussit cependant à montrer les dessous, à l'aide d'excellentes archives, d'une télévision mensongère, exhortant le spectateur à agir de son côté. Le buzz généré par internet par les deux vidéos sus-mentionnées est en quelque sorte le mégaphone médiatique dont Carles a voulu se servir pour se faire entendre.
Son film n'en devient alors que plus salutaire.


Fin de concession
De : Pierre Carles
Avec : le gratin de l'audiovisuel...
Durée : 2h11
Année de production : 2009


03/12/2010
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