How to kill time

Akiresu to kame

Enfin ! Enfin ! Enfin !


Après son dernier film Glory to the filmmaker en 2008, Kitano revient avec une fable sur l'art et le talent. Verdict ?



Akiresu to kame

(Achille et la tortue)


A des lieues de son cultissime Hana-Bi et de son très connu - trop peut-être - Zatoïchi, Kitano nous propose un film poétique, assez lent, grinçant, sur un artiste raté.
Car Machisu Kuramochi est un artiste raté. Enfant, l'on chante ses louanges, son père étant l'un des plus gros notables de sa région. Mais tout arrivant à une fin, son père décède et, paradoxalement - si l'on se permet cette ironie - tout l'art de Machisu décède en même temps. C'est ainsi que sera al vie de cet homme accroché à son rêve : entrecoupée de morts violentes, destructirce, dans une certaine mesure, et profondément stérile.

La question que semble nous poser Kitano n'est pas que sur le talent. Si son anti-héros le stipule ouvertement "Je n'ai pas de talent" est-ce pour autant qu'il ne peut être artiste ?
La question est complexe et apparaît, au travers des différents protagonistes, posséder des réponses multiples. Il est bien évident que, au premier abord, loin du "tout le monde a du talent" démagogique, Kitano oppose sa vision : non, tout le monde n'en a pas. Mais il nuance. Machisu n'a-t-il pas de talent, ou ne sait-il pas s'en servir ? Utilise-t-il son "âme" comme le fait un de ses camarades de l'école d'art ? Ou bien cède-t-il aux exigences purement commerciales du galeriste peu scrupuleux ?

En passant du pathétique douloureux à une vie de plus en plus burlesque, mais toujours sinistre, semblant montrer la spirale morbide et délirante dans laquelle Machisu s'est enfermée, à vouloir vivre son impossible rêve jusqu'au bout.



Machisu enfant, et déjà le béret de l'artiste



Cette vie en suspens est ainsi montrée à trois périodes de la vie de Machisu : de ses débuts "d'artiste", de son entrée "officielle" - ou décidée - dans le monde de l'art, et à la fin de son rêve. Chaque période de sa vie témoigne d'une photographie particulière, de couleurs plus marquées. Ainsi, son enfance semble particulièrement colorée, malgré le fait qu'elle semble dessinée au pastel et au fusain. Son adolescence, en revanche, est mécanique, c'est véritablement le début d'un certain automatisme mû par des volontés plus fortes et plus directives que la sienne. Enfin, sa fin de vie est étherée, comme inexistante, irréelle, la fin du rêve et le réveil douloureux. "Et Achille finit par atteindre la tortue".

Qu'est-ce que l'art, donc, nous demande-t-on ? Est-ce qu'une personne peut en décider ? Dans une région, le notable est la référence, "judicieusement" conseillé par des vendeurs en mal d'argent. En ville, là encore, le professionnel - commercial - est celui qui fait foi. Malheur à l'artiste qui ne connaît pas le succès, il il finira en professeur anéanti dans une école d'art quelconque. Plutôt que de se vivre à fond, Machisu multipliera les expériences sans pour autant réussir à se décider. Il restera, paradoxalement, plus spectateur qu'entrepreneur.



Le couple enfermé dans sa folie créatrice


Un point intéressant à soulever est la mort, omniprésente dans le film, qui encadre la vie de Machisu, comme pour lui dire que toutes ses tentatives sont vouées à l'échec, que les déclencheurs de sa passion sont tus parce qu'ils ne peuvent y arriver. Suit donc une monomanie du personnage qui tente, vainement, d'imiter ses modèles et qui, au final, se répète et copie.
Que manquait-il vraiment à Machisu ? Du talent ? Ou bien du succès ?

L'on voit, finalement, au bout de ce film, un portrait assez critique du réalisateur non seulement envers les artistes - ou supposés artistes - mais aussi envers les personnes qui, au nom de l'art, inhibent le talent des autres, l'avortent, car eux-mêmes n'en avaient aucun. Kitano se remet en question, en présentant ses propres toiles comme celles de son artiste raté. Est-il artiste ? Est-i lreconnu à sa juste valeur ? Voilà, en substance, où flotte ce film, poignant et pourtant durement désabusé.




Akiresu to kame
de : Takeshi Kitano
Avec : Takeshi Kitano, Kanako Higuchi, Yurei Yanagi
Durée : 1h59
Année de production : 2008


04/04/2010
0 Poster un commentaire

Inscrivez-vous au blog

Soyez prévenu par email des prochaines mises à jour